Contexte
Le Mali a toujours été un pays typique de
l'Ouest africain avec un islam plutôt modéré. Il s’agit d’un État laïc
qui proscrit les partis politiques religieux même si un fort pourcentage
de sa population est musulman. La religion est considérée comme étant
d’ordre privé et n’est en général pas politisée. Mais au Nord du pays,
les choses ont changé en 2012.
Place dans l’Index
La principale source de persécution au Mali
est l'extrémisme islamique. La révolte réussie des séparatistes
rebelles touaregs et des combattants islamistes a divisé le pays en
deux. Les islamistes ont rapidement créé un État islamique avec une
application sévère de la charia.
La plupart des chrétiens (plusieurs centaines vivaient là) ont fui avant l'arrivée des islamistes qui ont détruit des églises et d'autres bâtiments chrétiens à Tombouctou, Gao, avec la volonté d'éradiquer toute trace du christianisme. Ils ont été très durs envers les musulmans modérés, ils ont tué, effectué des amputations punitives et détruit des sanctuaires soufis.
Depuis le début des combats en mars 2012, des dizaines voire des centaines de milliers de Maliens ont fui vers le sud ou vers les pays voisins. Pour les chrétiens, partir était une question de survie.
À l'arrivée des rebelles, les chrétiens
étaient partis, laissant leurs maisons et leurs biens qui ont été
détruits ou confisqués. La plupart ont fui vers le sud et sont arrivés à
Bamako avec leurs femmes et leurs enfants, les mains vides. Certains
sont allés à Niamey, au Niger et parmi eux plusieurs ont continué leur
route jusqu'au Burkina Faso. Selon nos sources sur place, les islamistes
« fouillaient toutes les maisons au Nord pour trouver des chrétiens »,
en particulier des pasteurs.
L'hostilité est très forte. Dans une telle situation, les chrétiens n’ont pas le droit d’exister. Seuls quelques chrétiens restent au nord du Mali. Ils sont contraints de vivre clandestinement dans leur propre pays. Au Sud, la situation est meilleure, même s'il semble que les islamistes ont gagné en influence à cause des événements du Nord.
Perspectives
L'avenir de l'Église au Nord du Mali,
considéré par les islamistes comme le nouvel État de l'Azawad, est très
inquiétant. Tout d'abord, la présence et l'infrastructure du
christianisme ont été détruites. Cela prendra beaucoup de temps pour les
reconstruire, même si les islamistes sont chassés de la région.
L'avenir de l'Église au sud du Mali
pourrait aussi être affecté par l'influence grandissante des chefs
religieux du Grand Conseil Islamique en politique, en particulier s’ils
se dirigent vers l'idéologie wahhabite. Même si l'occupation du Nord
s'arrête, la radicalisation religieuse de la société malienne pourrait
progressivement continuer à faire pression sur les chrétiens et leurs
églises.
Informations sur l'Eglise
Les chrétiens ont toujours eu leur place
dans la société malienne, y compris les missionnaires chrétiens
étrangers. Au Nord, la situation était plus difficile que dans le Sud,
mais des missionnaires internationaux ont pu y travailler. La situation
des chrétiens d'origine musulmane a toujours été plus compliquée que
celle des autres chrétiens, mais les restrictions étaient souvent
supportables. La situation a évolué suite à la capture du Nord du pays
par les séparatistes rebelles touaregs et les combattants islamistes,
ainsi que par la création de l'État indépendant de l'Azawad au nord du
Mali (avril 2012).
Historique de la crise
Au début des années 1990, les touaregs
nomades du Nord ont lancé une insurrection contre des terres et des
droits culturels qui continue à ce jour malgré les tentatives militaires
de négociation du gouvernement. Cette insurrection s'est accélérée en
2007 et a été exacerbée par l'afflux d'armes de la guerre civile
libyenne en 2011 (BBC Mali profile, 13 novembre 2012).
Le renversement du président malien Amadou Touré le 22 mars 2012 a laissé un vide qui a été immédiatement rempli par les séparatistes rebelles du mouvement national pour la libération d'Azawad (MNLA) qui augmentaient leurs attaques dans la région depuis janvier, par les combattants islamistes d'Ansar Dine (défenseurs de la foi) et par le Mouvement pour l'unité et le djihad en Afrique de l'Ouest.
Le 6 avril 2012, le MNLA a proclamé la création de l'État indépendant de l'Azawad au Nord du Mali. Le MNLA a rapidement été mis sur la touche par la tentative des islamistes de créer un État islamique au Mali. Les islamistes agissaient sous l'égide d'al-Qaïda au Maghreb Islamique (AQMI) qui agit dans la région du Sahel depuis maintenant dix ans. Connu à l'origine comme Groupe Salafiste pour la Prédication et le Combat (GSPC), l'AQMI est né du Groupe Islamique Armé qui a mené une guerre sanglante contre le régime militaire algérien dans les années 1990. Il y a un fort risque que le Mali devienne un centre djihadiste, « un cocktail explosif de rébellion, de terrorisme et d'extrémisme religieux qui pourrait se répandre au-delà des frontières » (The Washington Post, 17 août 2012).
Le 12 octobre 2012, les Nations Unies (ONU) ont adopté deux propositions du gouvernement français. L'ONU a déclaré être prête à envoyer des forces internationales pour aider le gouvernement malien à reconquérir le territoire du Nord. Elle a également poussé la communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest à présenter un plan militaire.
Au même moment, l'ONU a appelé tous ses membres et ses organisations, dont l'Union européenne, à envoyer des instructeurs militaires pour former et organiser l'armée malienne. Elle a également demandé au gouvernement malien de commencer un processus de négociation avec les occupants du Nord, tandis que toutes les forces armées islamiques ont été appelées à se dissocier des groupes terroristes comme l'AQMI. Le BBC Mali profile (13 novembre 2012) signale que l'ECOWAS a accepté de lancer une expédition militaire pour reprendre le Nord lors d'une rencontre au Nigeria en novembre, avec le soutien de l'ONU et de l'Union Africaine. Les préparatifs devraient prendre plusieurs mois.