samedi 3 mars 2012

Iran: Obama ordonnera des frappes si les sanctions ne marchent pas

Iran: Obama ne « bluffe pas »

    Qui bluffe qui ?
   A la veille d'un début de semaine chargé sur le front du triangle Etats-Unis/ Israël / Iran (discours d'Obama à l'AIPAC dimanche matin; entretien avec Netanyahou lundi à la Maison Blanche..)
    le président américain a communiqué sa position dans une importante interview à Jeffrey Goldberg, de l'Atlantic Monthly (45 minutes !!) Il entend combler le "déficit de confiance" (comme dit le Washington Post) qui s'est installé entre Washington et Jerusalem. "Je ne bluffe pas", dit-il.
     Barack Obama explique que "comme le savent les gouvernements israélien et iranien", les Etats-Unis font ce qu'ils disent. S'il répète qu'un Iran doté de l'arme nucléaire est "inacceptable", c'est parce qu'il a l'intention de faire respecter sa parole.
   Autrement dit, il demandera aux forces américaines de détruire les sites nucléaires iraniens si les sanctions échouent à amener Téhéran à renoncer à son programme d'enrichissement.
    Selon le journaliste, il va essayer lundi de convaincre Netanyahou de renoncer à ses plans pour laisser la communauté internationale poursuivre le sien.
     -  "I think that the Israeli government recognizes that, as president of the United States, I don't bluff."
     - "I also don't, as a matter of sound policy, go around advertising exactly what our intentions are. But I think both the Iranian and the Israeli governments recognize that when the United States says it is unacceptable for Iran to have a nuclear weapon, we mean what we say."
     Pour la première fois, il apparait clair que les Etats-Unis ne veulent pas se cantonner à l'endiguement ("containment") grâce aux sanctions (comme ils l'ont fait pendant dix ans avec l'Irak). Le président explique qu'il est dans l'intérêt national des Etats-Unis d'empêcher l'Iran d'avoir la bombe, même si les Iraniens ne menaçaient pas Israël, mais à cause de la course folle aux armements que cela entrainerait au Moyen Orient.
   - "The dangers of an Iran getting nuclear weapons that then leads to a free-for-all in the Middle East is something that I think would be very dangerous for the world." 
     Il va essayer une nouvelle fois d'expliquer aux Israéliens que ce n'est pas le moment de raviver une quelconque solidarité envers les dirigeants Iraniens en leur fournir l'occasion de se poser en victimes.
   - "At a time when there is not a lot of sympathy for Iran and its only real ally, [Syria,] is on the ropes, do we want a distraction in which suddenly Iran can portray itself as a victim?"
 
    Il veut amener l'Iran à renoncer comme l'ont fait la Libye et l'Afrique du Sud. Ils pense que les Iraniens peuvent très bien décider que de rester au "seuil" de la bombe leur convient très bien. Ce qui serait "la meilleure décision pour la sécurité d'Israël".
    - "Without in any way being under an illusion about Iranian intentions, without in any way being naive about the nature of that regime, they are self-interested," Obama said. "It is possible for them to make a strategic calculation that, at minimum, pushes much further to the right whatever potential breakout capacity they may have, and that may turn out to to be the best decision for Israel's security."  
    Obama est interrogé sur le fait que le premier ministre israélien fait souvent référence à l'Holocauste (Le Washington Post a rappelé il y a deux jours qu'en 1996 déjà, Netanyahou avait tenu un discours devant le Congrès pour l'alerter sur l'imminence de la bombe iranienne..)
   - “The deadline for attaining this goal is getting extremely close
    Et qu'en 2006, il formulait l'équation en termes pré-Seconde Guerre mondiale
    - "“It’s 1938 and Iran is Germany, and it’s racing to arm itself with atomic bombs"
Ou encore il y a un mois, pour reprocher à beaucoup de rester silencieux devant les menaces iraniennes de rayer Israël de la carte:
   - “Seventy years after the Holocaust, many in the world are silent in the face of Iran’s pledges to wipe Israel off the face of the earth,” ).
   Le président américain comprend la référence mais fait remarquer qu'Israel est un "Etat moderne" et que les dirigeants israéliens prennent très au sérieux les conséquences d'une attaque.
GOLDBERG: Is it possible that the prime minister of Israel has over-learned the lessons of the Holocaust?
PRESIDENT OBAMA: I think the prime minister has a profound responsibility to protect the Israeli people in a hostile neighborhood, and I am certain that the history of the Holocaust and of anti-Semitism and brutality directed against the Jewish people for more than a millennium weighs on him when he thinks about these questions.
I think it's important to recognize, though, that the prime minister is also head of a modern state that is mindful of the profound costs of any military action, and in our consultations with the Israeli government, I think they take those costs, and potential unintended consequences, very seriously.
    Benjamin Netanyahou sera-t-il convaincu que Barack Obama ne "bluffe pas" ? Comme pour attester de ce sérieux, un certain nombre de planificateurs militaires ont fait savoir au Washington Post que ce qui était considéré il y a peu comme mission imposssible - la destruction des sites nucléaires iraniens enfouis dans la montagne- ne l'étaient pas tant que cela....
    Comme le dit Martin Indyk, ancien ambassadeur américain en Israel, il devient extrêment difficile de s'y retrouver dans les signaux -"spin"- qui sont donnés par les uns et les autres par medias interposés.
    Quand les militaires mettent en garde contre les conséquences de frappes israéliennes, ils envoient aux Iraniens le signal que les Etats-Unis vont restreindre Israël..
    Et d'après lui, Obama en intensifiant les sanctions, rend l'issue négociée impossible et motive encore plus les Iraniens pour accélerer le programme et passer le seuil.
    Tout cela sur fond de campagne électorale. Et on peut compter sur les trois candidats républicains, qui vont parler mardi à l'AIPAC, pour mettre de l'huile sur le feu...

Source:
http://clesnes.blog.lemonde.fr/2012/03/02/iran-obama-ordonnera-des-frappes-si-les-sanctions-de-marchent-pas/