Les deux fortes frappes d’Israël en Syrie en trois jours – la seconde prenant pour cibles les emblèmes du pouvoir d’Assad supervisant Damas depuis le Mont Qassioun – apparaissent faire partie d’un plan tactique mis au point par les Etats-Unis, Israël et deux puissances sunnites, la Turquie et le Qatar, afin de briser le bloc radical Téhéran-Damas-Beyrouth et, finalement, contraindre l’Iran à renoncer à ses aspirations à la bombe nucléaire.
C’est ainsi qu’il a été interprété par le Guide Suprême, l’Ayatollah Ali Khamenei, Bachar al Assad et Hassan Nasrallah, alors qu’ils préparent leurs répliques aux attaques israéliennes.
Sans confirmer officiellement que ces frappes aient jamais eu lieu, Israël a insisté sur le fait que ses forces aériennes et ses roquettes visaient uniquement les armes iraniennes avancées, stockées en Syrie à destination du Hezbollah – et le Hezbollah lui-même. Ce message était conçu avec un objectif précis : il était destiné à soutenir l’argumentaire de Washington envers Moscou, qu’Israël ne dirigeait pas ses bombes et ses roquettes contre Assad et son armée – mais seulement la présence militaire iranienne et du Hezbollah en Syrie.
Mais cela n’a pas tout-à-fait marché de cette manière, parce que personne à Damas n’a pu fermer l’œil, dans la nuit du dimanche 5 mai, alors que les roquettes d’Israël faisaient trembler la ville, dans ce qu’on a décrit comme un tremblement de terre de magnitude 4, et qu'elles infligeaient de lourdes pertes – non pas aux brigades du Hezbollah combattant en Syrie [le journal koweitien al-Qabas mentionne au moins 13 membres du Hezbollah tués par les frappes israéliennes, le Hezbollah s'interrogeant sur la précision des renseignements israéliens pour les déloger], mais bien aux unités de l’élite de l’armée syrienne, positionnées autour du Mont Qassioun.
Les colonnes de feu et de fumée au-dessus de Damas sont passées à la vitesse de l’éclair à travers tous les écrans du monde entier, provoquant une grave perte de prestige pour le régime Assad et son armée.
Les responsables syriens n’ont, alors, rien pu faire de moins que de diffuser de terribles menaces de guerre, mais ils seraient bien embarrassés s'ils devaient aller plus loin. Lundi 6 mai, le dictateur syrien a formulé son prochain plan d’action, dans un message envoyé à Moscou : une troisième frappe israélienne déclencherait une réplique syrienne instantanée, a-t-il averti. Damas pourrait lâcher la bride aux organisations palestiniennes, pour mener des attaques contre Israël depuis le Golan syrien [NDLR : qu’il ne contrôle plus totalement-]. Ce que cela présage, selon nos sources militaires, c’est le lancement d’une guerre de harcèlement transfrontalière, mise sur pied par des soldats de Syrie et des membres du Hezbollah déguisés en combattants palestiniens. Cela si seulement Israël poursuit ses assauts en Syrie.
Le porte-parole iranien du Ministère des affaires étrangères, Ramin Mehmanparast, a déclaré lundi, que « les actes d’agression d’Israël contre la Syrie ne resteraient pas sans réponse, et que Tel Aviv subirait une réplique écrasante ».
Pendant ce temps, on peut s’attendre à ce que Washington cherche à prolonger l’opération israélienne en Syrie, vers la fin de mai, ou le début de juin, par d’autres opérations consistant à fournir des armes américaines aux rebelles syriens, pour qu'ils détruisent les installations aériennes de l’aviation syrienne et les sites de missiles, avec l’appui éventuel de frappes aériennes américaines, en provenance de Turquie, d’Europe et d’Israël. Barack Obama avait employé cette tactique pour renverser Mouammar Kadhafi, en Libye, il y a deux ans.
L’Administration Obama a fait le point sur le maintien de ces options, mises sous presse par les médias de lundi, après avoir dit, en réponse à une question sur les frappes aériennes israéliennes : « Israël est tout-à-fait justifié à préserver sa sécurité contre des armes avancées qui tomberaient entre les mains du Hezbollah ».
Selon les sources militaires de Debkafile : Puisque les rebelles syriens se font systématiquement terrassés et s’écroulent sous le poids écrasant de l’armée syrienne, appuyée par les troupes iraniennes et du Hezbollah, ainsi que par Moscou, en sous-main, alimenter les rebelles avec des armes supplémentaires pourrait bien ne plus être d’une grande utilité. C'est ce qui permet de penser que cela être l’option la moins probable des deux.
Et, simultanément, l’opération militaire d’Israël a altéré l’équation militaire, jusqu’à présent, favorable à la Syrie. Ainsi, le Président Barack Obama peut, à nouveau tenter de faire une proposition à Vladimir Poutine, visant à faire un effort conjoint pour mettre un terme à la guerre syrienne. Il ne serait même pas opposé à ce que des forces russes atterrissent en Syrie pour renforcer une solution en vue de l’arrêt des hostilités. Le Président américain n’a rien obtenu du tout, au cours de ses précédentes tentatives pour briser le front irano-syrien, appuyé par le Hezbollah – principalement, parce que ses tentatives étaient déjouées par la Russie.
Le 27 avril, avant le lancement de l’action israélienne contre la Syrie, l’adjoint au Ministre des affaires étrangères russe, Mikhaïl Bogdanov a forgé une nouvelle alliance russe avec le Hezbollah, à Beyrouth. C’était la réponse de Poutine à l’appel direct d’Obama, en vue d’un partenariat, dans un effort commun pour mettre fin au conflit syrien.
La réplique d’Obama a consisté à donner le feu vert à Israël pour frapper des cibles iraniennes et du Hezbollah en Syrie. Le fait qu’un « officiel des renseignements américains » ait prétendu qu’Israël n’avait pas prévenu Washington, avant de lancer son opération en Syrie ne tient pas la route. Le gouvernement Netanyahou peut bien s’être lancé, de son propre chef, dans une opération « justifiée » contre les armements sophistiqués iraniens à destination du Hezbollah, mais n’aurait pas pris le risque de frapper les troupes d’élite de l’armée syrienne sur le Mont Qassioun, sans, auparavant, tirer tout cela au clair avec l’Administration Obama.
Mais la nouvelle direction prise par les évènements, à présent, semble compromettre les plans de Washington, en vue d’un arrangement entre les superpuissances pour terminer l’effroyable crise syrienne. Les acteurs locaux, Khamenei, Assad et Nasrallah, sont prêts à s’emparer des commandes et à pousser l’Amérique et Israël de la place du conducteur.
Assad a prévenu Moscou, lundi, de son projet de guerre de harcèlement contre Israël, en utilisant des combattants palestiniens dans le rôle d’accrocheurs, pendant que l’Iran, la Syrie et le Hezbollah pointaient leurs batteries de missiles en direction d’Israël.
Après avoir pris le risque calculé que la Syrie serait trop occupée, à cause de sa propre guerre interne, pour pouvoir mener des représailles d’envergure, Israël a, néanmoins, placé, dimanche soir la région des frontières nord du pays, y compris la grande ville portuaire de Haïfa – et ses systèmes d’alerte précoce – au plus haut niveau d’alerte en cas de guerre, a fermé son espace aérien du nord du pays au trafic civil, pour quelques jours, positionné des batteries anti-missiles Dôme de Fer aux points les plus vulnérables et conseillé aux autorités locales de rester sur le qui-vive.
Toutes les parties concernées, de Washington à Moscou, en, passant par Jérusalem, Téhéran, Damas et Beyrouth attendaient, sur des charbons ardents pour voir qui se risquerait à faire le premier mouvement.
DEBKAfile Exclusive Analysis May 6, 2013, 12:05 PM (IDT)
Adaptation : Marc Brzustowski